Création de la Confrérie des Charitables,

rue des Charitables à Béthune

la Confrérie des Charitables

Exactitude - Union - Charité
 
En 1188, suivant une pieuse légende, alors que la peste exerçait ses ravages dans la ville de Béthune et aux environs, les cadavres des pestiférés demeuraient souvent sans sépultures, tant était grand l'effroi de cette terrible maladie. Or, une nuit, deux maréchaux ferrants, Gauthier du faubourg de St Pry à Béthune et Germon forgeron de Beuvry village voisin, eurent le même songe une nuit de septembre 1188. Saint Eloi leur apparut, leur parla, leur enjoignant de former une Karité ou Confrérie, vouée à l’ensevelissement des morts. Ils marchèrent et se rencontrèrent près d’une source à Quinty (cette source était déjà connue aux temps des romains) à la limite des deux villages. Tous deux se communiquèrent la vision qu'ils venaient d'avoir, et, après avoir pris conseil du prieur de St-Pry, ils fondèrent, dès le lendemain, « La Confrérie des Charitables ». Cette association avait pour but de soigner les pestiférés, et d'ensevelir les morts et de les porter au lieu du repos. Au moyen de quelques dons, une chandelle de cire vierge fut confectionnée en l'honneur de Dieu et de Saint Eloi : la partie supérieure en fut donnée à la confrérie de Beuvry pour bien montrer qu'elle ne formait qu'une seule société fraternelle avec celle de Béthune qui garda la partie inférieure. Le prieur Rogon donna un cimetière pour la sépulture des charitables.

La nouvelle confrérie fut encouragée par la protection des seigneurs de Béthune, des comtes de Flandre et d'Artois qui lui concédèrent de nombreux privilèges.

Elle comptait d'abord deux sections, l'une, se réservant le soin de porter les morts en terre, l'autre se consacrant à soigner les malades à domicile et s'intitulant « Confrérie de Saint Nicolas ».

Du XII au XVIII ème siècle

Du XII ème au XVIII ème siècle, un très grand nombre de personnes se firent inscrire sur les registres de la Confrérie qui compta parmi ses membres associés des nobles de France, d'Espagne, d'Allemagne et des Pays-Bas.

Le Prévôt était exempté du logement des gens de guerre, et, même quand un simple maréchal-ferrant en était le chef, le prévôt et les maïeurs de la Confrérie étaient convoqués aux assemblées des notables, dans la halle échevinale, avec les gentilshommes, les officiers du roi et les représentants du haut clergé.

Au XVII ème siècle, quand les charitables avaient à ensevelir les pauvres et les soldats, ils les entouraient de paille et les plaçaient dans un cercueil muni, à l'extrémité, d'une coulisse que l'on ouvrait sur les bords de la fosse. « Les Charitables se faisaient un devoir, lorsque le cadavre tombait face contre terre, de descendre dans la fosse, de le placer d'une manière convenable et de rajuster la paille. On comprend à quels dangers ils s'exposer en prenant dans leurs lits ou même en rase campagne dans les fossés, les cadavres décomposés des pestiférés ». Une tradition constante veut que jamais, ni les charitables, ni les serviteurs qui nettoyaient leurs vêtements n'aient jamais été atteint de la peste.

Jusqu'en 1573, les maîtres maréchaux conservèrent le privilège exclusif d'exercer la charge de Prévôt, mais, à partir de l'année suivante, les statuts furent modifiés et permirent d'accorder cet honneur à n'importe quel ancien confrère. Sous Louis XV, les deux confréries de Saint-Nicolas et de Saint-Eloi qui, depuis longtemps, s'étaient séparées, furent fusionnées en 1747.

Pendant la Révolution

Pendant la Révolution, l'association fut officiellement supprimée en 1792, mais ses membres n'en continuèrent pas moins à agir comme par le passé, protégés par la sympathie de la grande masse de la population. En 1802, le maire de Béthune leur restitua le droit de transporter les morts.

Au XIX ème siècle, la Confrérie s'est reconstituée et continue d'exister.

Composition de la Confrérie

Elle se compose de vingt et un membres actifs : un Prévôt, quatre Maïeurs et seize Confrères. Le prévôt en exercice est le chef de la Confrérie, en cas de décès, c'est le prévôt de l'année précédente qui le remplace. Le plus ancien des prévôts est le président d'honneur et porte le titre de doyen. L'un des confrères est qualifié de cher et bien-aimé, lorsque, pour un motif quelconque, les confrères rendent en corps une visite à l'un d'eux, c'est lui qui présente les souhaits au nom de tous.

Tenue vestimentaire des Charitables

Avant la Révolution, les Charitables portaient le chapeau tricorne, leur costume se composait de l'habit noir, culotte, bas de soie et souliers à boucle, rabat bleu de ciel et cravate blanche, enfin un manteau qui, en cas de beau temps, se relevait sur les épaules, descendait à la hauteur du genou.

Actuellement, le grand costume comprend : l'habit, le gilet et le pantalon de drap noir, un petit manteau en camelot attaché au collet de l'habit, le chapeau français ancien à deux cornes, rabat bleu céleste, cravate blanche et gants blancs.

Les règlements de la Confrérie

Les règlements prévoient de la façon la plus minutieuse le rôle et l'attitude de chacun des confrères dans les cérémonies funèbres où ils prêtent le concours de leur charitable ministère. Et ce n'est pas un des spectacles les moins touchants que la procession annuelle qui, selon l'antique usage, réunit aujourd'hui encore les Charitables de Béthune et ceux de Beuvry, dans les derniers jours de septembre. C'est la « Procession à naviaux où l'on se rend à la chapelle de Quinty ». Les deux confréries se rencontrent au lieu même où Germon et Gautier jetèrent les bases de leur association, les prévôts se donnent l'accolade, en renouvelant les vœux d'éternelle union émis d'année en année depuis sept siècles par leurs prédécesseurs. Au retour a lieu le festin offert par le cher et bien-aimé. C'est au plat traditionnel de navets qui s'y servait jadis que cette cérémonie doit son appellation pittoresque. Il est à souhaiter que se conserve longtemps encore cette association qui évoque les souvenirs d'un si lointain passé.
 

Texte issu du livre Histoires de Flandre et d'Artois de 1913

La Confrérie des Charitables existe toujours. En 1988 elle a fêté ses 800 années d'existence.

retour navigation
retour navigation