Biographie de l'abbé de l'Épée


l'abbé de l'Épée

l'abbé de l'Épée
né à Versailles le 24 novembre 1712
décédé à 23 décembre 1789

 

Charles Michel de l'Epée naquit à Versailles le 24 novembre 1712. Son père architecte expert des bâtiments du roi et homme de bien autant que de talent, lui fit donner une excellente éducation; le jeune homme en profita, prit goût à l'étude des sciences et y fit des progrès qui firent espérer à son père de trouver en lui un successeur.
Cette attente fut déçu : Charles Michel témoigna, au sortir de ses études, le désir d'embrasser l'état ecclésiastique et ses parents tout contrariés qu'ils étaient de cette résolution, ne voulurent point cependant la combattre; ce fut lui-même qui songea à l'abandonner quand il dut, pour recevoir la prêtrise, signer un formulaire qui blessait sa conscience; ses vues se tournèrent alors vers le barreau, il étudia le droit et se fit recevoir avocat, puis plus tard, ramené à sa première pensée et affranchi dans le diocèse de Troyes d'une obligation qu'on avait voulu lui imposer dans celui de Paris, il reçut l'ordination de la main d'un neveu de Bossuet. Ses relations avec un protestant célèbre nommé Ulrich, l'amitié que lui témoignait un prélat janséniste, ses vœux hautement exprimés en faveur de la liberté des cultes ayant fait mettre en doute son orthodoxie, on lui interdit le ministère de la confession et de la prédication; mais à ces tribulations il opposa tant de douceur, de résignation et d'humilité, que ses supérieurs ne tardèrent pas à reconnaître leur erreur et à lui rendre justice.
Son âme naturellement tendre l'était devenue plus encore au milieu de ses peines; le hasard lui fournit l'occasion de le montrer en appelant son attention sur un genre d'infortune que personne alors ne songeait à soulager, parce qu'on supposait que ceux qui l'éprouvait y étaient insensibles.
Un jour, appelé par une affaire de peu d'importance dans une maison de la rue Saint Victor, dont la maîtresse était absente, il fut introduit dans une chambre où deux jeunes filles occupées de travaux d'aiguille, ne lui dirent pas un mot; les quelques questions qu'il leur fit restèrent sans réponse; il éleva la voix, on ne lui répondit pas d'avantage; il chercha en lui-même l'explication d'un fait aussi étrange quand arriva la mère des deux jeunes filles, qui lui apprit qu'elles étaient sourdes et muettes.
A dater de ce moment, il conçut le désir et chercha le moyen de remplacer chez ces pauvres enfants et chez leurs semblables l'ouïe et la parole; le langage des gestes lui parut pouvoir servir, aussi bien que les sons et les lettres de l'alphabet, à la communication des idées; ce fut là son point de départ. Une fois sa route tracée, il y marcha avec une infatigable ardeur, rien l'en écarta, ni la peine, ni la dépense, ni la longue impuissance de ses efforts; il crut avec Buffon, que la patience c'est le génie, avec Newton, qu'on trouve la solution d'une difficulté en y pensant toujours. Il arriva enfin, par une admirable application de l'art mimique, a créer une langue spéciale pour les sourds-muets.
Homme simple et modeste, il publia le livre où était consigné sa découverte sans même y mettre son nom.
Il sut également mettre à profit quelques idées du livre de Conrad Ammon, qui a pour titre : « Dissertation sur l’enseignement des sourds-muets »
Trop sage pour dédaigner les travaux de ses devanciers, mais trop supérieur à eux pour les suivre en aveugle, il poursuivit sa route heureux d’y trouver de loin en loin quelques lueurs fugitives; méditant beaucoup, mais étudiant encore plus, parce qu’il savait parfaitement que connaître sert beaucoup pour inventer
Voilà ce qui donna tant de mérite à sa méthode, et à l’application qu’il en fit avec un gros succès si admirable; cette application fut pour les sourds-muets une découverte d’un nouveau monde, ils entrèrent par là en communication avec le reste des hommes : les orphelins de l’intelligence eurent leur Saint Vincent de Paul
Comme des doutes, les mécomptes, les calomnies, les sacrifices de tout genre n’avaient point découragé l’abbé de l’Epée, le succès ne lui ôta rien de sa simplicité et de sa modestie; il se montra touché et non vain des félicitations des grands savants, refusa les offres magnifiques de l’empereur Joseph et de l’impératrice Catherine , ne voulut ni d’une riche abbaye en Allemagne, ni d’un évêché en France, et n’accepta que pour son institution seulement le patronage de Louis XVI : cette institution était tout pour lui; ses élèves étaient ses enfants et il savait au besoin les protéger.
La mort surprit l’abbé de l’Epée au milieu de ses travaux, auxquels il ajoutait à mesure qu’il avait moins de forces; pauvre, infirme, octogénaire, il se privait, pour ses chers élèves, des choses les plus nécessaires, même de feu pendant l’hiver; sa petite fortune était, à ses yeux, leur patrimoine dont il ne voulait rien détourner; les plus pauvres d’entre eux étaient même ceux qu’il paraissait affectionner le plus; à soixante ans il apprit trois langues de plus pour avoir le moyen d’être utile à un plus grand nombre d’entre eux : la science ne lui paraissant avoir de prix qu’autant qu’elle se mettait au service de la bonté.
L’œuvre qu’il a fondée lui a survécue; son institution des sourds-muets adoptée et dotée par l’Assemblée constituante , est devenue une institution nationale qui a servi de modèle à d’autres institutions du même genre en Europe et en Amérique , il mourut le 23 décembre 1789. Deux monuments ont été élevés à sa mémoire : l’un à Paris, dans l’église Saint-Roch, l’autre sur une des places publiques de la ville de Versailles, lieu de sa naissance.
 


l'abbé de l'Épée
retour biographie des hommes utiles

Biographie de Charles-Michel DE L'ÉPÉE