Biographie de
Jean François Galaup de La Pérouse (1741-1788)

(texte issu du livre Journal des Enfants après 1835)


Parmi les navigateurs qui se sont illustrés par leurs découvertes, il en est plus d'un qui ont péri victime de leur zèle courageux. MAGELLAN, par exemple, DRAKE, COOK et tant d'autres. La France possède un grand nom qu'elle doit ajouter à cette liste funèbre, celui de La PÉROUSE, nom triste et glorieux à la fois, nom qu'elle cite avec admiration et regrets. Jean François GALAUP de La PÉROUSE était né à Alby, en Languedoc en 1741. Entré en service en 1756, comme garde de la marine, il se distingua dans la guerre de sept ans, puis dans celle d'Amérique en 1778, où il fut chargé de détruire les établissements anglais dans la baie d'Hudson. Il s'acquitta de cette mission difficile avec le plus grand succès, et, de plus, il su concilier les droits de l'humanité avec ses rigoureux devoirs. Ayant appris qu'à son approche des Anglais avaient fui dans les bois, où ils pouvaient succomber à la misère ou périr sous les coups sauvages; il eut la générosité, malgré sa qualité d'ennemi, de leur laisser en partant des vivres et des armes. La PÉROUSE avait été nommé successivement capitaine de frégate, puis capitaine de vaisseau, quand il fut choisi, en 1785, pour commander l'expédition composée des deux frégates " la Boussole et l'Astrolabe " , que l'on armait au port de Brest pour un voyage de découverte autour de monde. Indépendamment de son but scientifique, cette expédition avait encore une autre destination, aussi honorable pour le souverain qui avait ordonné ce voyage, que pour le marin chargé de l'exécuter. Les deux frégates françaises devaient, tout au long de la route, distribuer aux populations des graines de plantes et de fruits d'Europe, leur inculquer les connaissances qui pourraient leur être utiles, et contribuer à leur bien être. Le roi Louis XVI rédigea lui-même, pour La PÉROUSE, un mémoire détaillé qui prouve chez ce prince l'instruction la plus étendu et la plus solide, en même temps que le plus ardent amour pour l'humanité. " Sa Majesté, est-il dit à la fin de ce Mémoire, regarderait comme un des succès les plus heureux de l'expédition, qu'elle pu être terminée sans qu'il en eût coûté la vie à un seul homme " . Dans ces instructions, véritable monument à la gloire de Louis XVI, on reconnaît le prince qui, en 1778, pendant la guerre contre les Anglais, avait ordonné à ses vaisseaux de respecter sur toutes les mers les bâtiments du capitaine COOK, qui exécutait alors un voyage de découvertes semblables à celui de La PÉROUSE, et même de fournir à cette illustre marin tous les secours dont il pourrait avoir besoin. Indépendamment de plusieurs officiers d'un grand mérite, des artistes et des savants s'embarquèrent sur" la Boussole et l'Astrolabe " , afin que ce voyage fût aussi utile que possible aux progrès des sciences. Parmi eux se trouvait M. de LAMANON, minéralogiste et physicien distingué.

I
 


Ses vaisseaux, abondamment approvisionnés, furent, en outre, munis d'une grande quantité d'objets propres à être distribués aux populations, et de tous les instruments qui pouvaient servir aux expériences et aux observations scientifiques. Ce fut le 1er août 1785 que l'expédition mit à la voile de Brest. Elle aborda d'abord à l'île de Ténériffe, qui montre de si loin aux navigateur son pic aérien; puis se dirigeant vers le sud-ouest, elle traversa l'océan atlantique, qui sépare l'ancien monde du nouveau, et atteignit, le 6 novembre , l'île Sainte Catherine sur la côte du Brésil; puis, portant vers le sud, elle passa devant l'embouchure du grand fleuve de la Plata, longea la Patagonie. Les deux frégates doublèrent ensuite le cap Horn, point la plus méridionale de l'Amérique, et changeant tout à fait de direction, arrivèrent le 24 février 1786, à la conception du Chili, sans avoir eu dans tout leur équipage un seul malade, pendant le cours d'une navigation de sept mois, ce qui n'était jamais arrivé à aucun vaisseaux. Le voyage continua d'une manière non moins favorable à travers la mer du sud, où La PÉROUSE reconnut les îles Sandwich et Mowée, jusqu'à une baie qu'il nomma " le Port des Français ", au nord de la Californie, dans l'Amérique septentrionale. C'est là qu'après un voyage si long et si constamment heureux, un affreux malheur attendait les deux équipages. En reconnaissant cette baie, le 15 juillet 1786, deux canots, l'un appartenant à " la Boussole " et l'autre à " l'Astrolabe " furent entraînés par un courant au milieu des écueils, et engloutis avec tous ceux qui les montaient, sans qu'il fût possible de leur porter secours. De ce nombre étaient MM. de la BORDE, deux frères qui servait à bord du même vaisseau, et qui périrent ensemble. Pénétrés de douleur, nos marins élevèrent, dans une île située au milieu de la baie, et nommé à cette occasion île du Cénotaphe, un monument à la mémoire de leurs malheureux camarades. L'inscription suivante, avec un précis de cet affreux désastre, fut enterré dans une bouteille au pied du monument.


A L'ENTREE DU PORT ONT PERI
VINGT ET UN BRAVES MARINS.
QUI QUE VOUS SOYEZ,
MELEZ VOS LARMES AUX NOTRES.

II
 


La PÉROUSE, en quittant ce port funeste, continua d'explorer les côtes de l'Amérique du nord; puis traversant la mer du Sud, où il découvrit quelques petites îles, il arriva à le 3 janvier 1787 à Macao, en Chine, ville où les Portugais possèdent un établissement commercial. De là il se rendit à Manille, capitale des îles Philippines, qui appartiennent à l'Espagne. Nos navigateurs furent très bien reçus dans ces deux colonies étrangères, dont les deux gouverneurs les comblèrent de politesses et de prévenances. Ils partirent ensuite pour continuer leur mission, qui était de visiter les côtes du pays des Tartares Mantchoux, l'embouchure du grand fleuve Ségalien et les mers fort peu connues qui avoisinent le Japon; car figurez vous que pour tracer les cartes géographiques, dont l'usage vous est si familier, on a fait bien des voyages périlleux, on a reconnu l'une après l'autre toutes les îles, toutes les baies, toutes les découpures de côtes que y voyez tracées. Cette exploration de la Tartarie et du Japon, exécutée par La PÉROUSE, a été d'une très grande utilité pour la science. Les Russes lui firent le meilleur accueil dans sa relâche au Kamtschaka. En effet, des voyages comme ceux là sont d'une utilité générale pour tous les peuples; c'est un service rendu aux navigateurs de tous les pays. La PÉROUSE trouva au Kamtschaka le brevet de sa nomination au grade de chef d'escadre, juste récompense de ses services. Depuis le fatal naufrage du Port des Français, les vaisseaux de La PÉROUSE n'avait éprouvé aucun accident dans leur route; leurs relations avec les peuples qu'ils avaient visités avaient toujours été fort amicales, et nos marins ne s'étaient pas trouvés une seule fois dans la pénible nécessité de faire usage de leurs armes; on était donc bien loin de s'attendre à la seconde catastrophe qui attrista bien douloureusement le voyage. En quittant Kamtschaka, La PÉROUSE traversa de nouveau une partie de la mer des Indes pour se rendre à la Nouvelle Hollande, et, dans ce trajet, il mouilla près de Maouna, l'une des îles des Navigatears. Cette île est de l'aspect le plus agréable, couverte de verdure et d'arbres chargés de fruits, arrosée par des ruisseaux limpides.

III
 


Après une longue route sur mer, un si riant paysage paraît encore bien plus beau: et comme les insulaires, aussitôt après l'arrivée des frégates étaient venus en foule avec leurs pirogues au-devant des Français, La PÉROUSE profita d'une occasion si favorable pour renouveler ses provisions. Les insulaires en apportèrent dans leurs canots une très grande quantité, telles que des fruits et des bestiaux, qu'ils échangeaient contre des grains de verroterie et d'autres bagatelles d'Europe, dont ils faisaient un beaucoup plus grand cas que d'objets d'une utilité réelle. M. de LANGLE, qui commandait " l'Astrolabe " sous les ordres de La PÉROUSE, craignait de manquait d'eau pour son équipage, on résolu d'en aller chercher à terre. Le 11 décembre 1787 , quatre embarcations des deux frégates, montées par soixante hommes, sous les ordres de M. de LANGLE, abordèrent dans l'île. Là, on se trouva environné par mille à douze cents hommes, qui reçurent assez bien les Français, mais sitôt que les tonneaux remplis d'eau eurent été replacés dans les chaloupes, voyant la difficulté que l'on éprouvait à les remettre à flot, ils commencèrent à faire pleuvoir sur nos marins une grêle de pierres. M. de LANGLE, par humanité, tardait à commander le feu contre ces hommes, mais lui-même il fut atteint. Le naturaliste LAMANON et dix marins furent tués.

IV
 


La PÉROUSE s'éloigna de ce mouillage funeste, et arriva le 26 janvier 1788 , dans Nouvelle Hollande, à la colonie anglaise de Botany-Bay. De ce port sont datées les dernières nouvelles que l'on ait reçues de La PÉROUSE. Il devait partir de Botany-Bay vers la fin du mois de février suivant, pour se rendre à l'Ile de France, après avoir exploré la Louisiane, la Nouvelle Guinée et d'autres terres mal connues, situées au nord de la Nouvelle Hollande. De l'Ile de France, son plan était de revenir à Brest pour terminer un si long voyage. Mais depuis cette époque, on a plus entendu parler de l'expédition. Quand l'époque fixée pour son retour fut passée, sans qu'on le vit reparaître, de tristes pressentiments s'emparèrent de tous les esprits. La femme de La PÉROUSE, les familles de tant de braves marins, embarqués avec lui, étaient dans la plus douloureuse anxiété et n'osaient encore renoncer à l'espérance. On se flattait que si les vaisseaux avaient péri, du moins les équipages s'étaient sauvés à terre, et qu'il serait possible de les retrouver, en suivant la route que La PÉROUSE devait parcourir à son départ de Botany-Bay.

V
 


En 1791 , une expédition, sous le commandement de M. d'ENTRECASTEAUX, fut envoyé à sa recherche; elle revint sans avoir rien découvert. Dès lors il fallut renoncer à tout espoir. De longues années s'étaient écoulées, lorsque, sur des renseignements fournis par un anglais nommé DILLON, le capitaine DUMONT-DURVILLE, dans le voyage autour monde qu'il fit en 1826 , 1827 et 1828 , eut ordre de s'assurer, s'il était possible, du lieu du naufrage de La PÉROUSE. D'après les preuves recueillies dans ce voyage, on a la certitude que " la Boussole et l'Astrolabe " ont dû se perdre sur les écueils de l'île Vanikoro, à l'est de la Nouvelle-Hollande. Les indications de quelques indiens âgés on fait connaître qu'il y a un grand nombre d'années, deux grands bâtiments européens périrent en effet près de leur île, dans une violente tempête, qu'il fut impossible de sauver les équipages; en plongeant près de la côte, on a retrouvé des canons, des armes et d'autres objets, évidemment de fabrication française, tristes débris de ce naufrages. Ces objets ont été apportés en France et sont déposés à Paris, au musée naval. Telle fut la triste issue du voyage de La PÉROUSE. Le journal de son voyage, depuis Brest jusqu'à Botany-Bay, a été publié: c'est un livre extrêmement curieux, dont la place est marquée à côté des voyages du capitaine COOK.

VI
 

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Date de modification : 8 mai 2007